À l’aube de la Première Guerre mondiale, le Canada compte à peine 8 millions d’habitants. Une importante minorité de Canadiens anglophones sont d’origine britannique ou les enfants d’immigrants britanniques; l’origine ethnique d’environ 28 % de la population
canadienne est française. Des centaines de milliers de personnes avaient émigré d’autres régions d’Europe pour s’établir au Canada au cours des 15 années précédentes.
LA CONSCRIPTION
La grande controverse suscitée par la participation canadienne à la guerre sud-africaine (1899-1902) et la création d’une marine canadienne en 1910 divisent la nation sur le plan linguistique et ébranlent l’unité nationale. Plusieurs mois après le début
de la Première Guerre mondiale, alors que l’ampleur de l’enrôlement volontaire se maintient, le premier ministre Robert Borden promet qu’il n’y aura pas de conscription pour le service outre-mer. Sa promesse initiale d’envoyer 25 000 volontaires est
tenue haut la main, car ce nombre s’élève rapidement à 50 000. En juin 1915, le gouvernement promet de mobiliser 150 000 hommes pour l’effort de guerre. À l’automne, ce nombre grimpe à 250 000. Étonnamment, le 1er janvier 1916, Borden parvient
à le doubler (500 000), soit un effectif à peine réalisable si l’on tient compte uniquement du nombre d’hommes d’âge militaire au pays. Après un ralentissement marqué du recrutement et la perte de plus de 10 000 hommes lors de la prise de la crête de
Vimy (sans compter d’autres pertes importantes au front), Borden annonce, en mai 1917, que le service militaire obligatoire deviendra loi pour honorer l’engagement du pays à participer à l’effort de guerre. Cette déclaration et la Loi sur le service militaire,
adoptée à la fin du mois d’août, provoquent le mécontentement généralisé des Canadiens français, la déception de nombreux agriculteurs canadiens en Ontario et dans l’Ouest (beaucoup sont des immigrants non britanniques) et une vive opposition du mouvement
syndical. Néanmoins, 125 000 nouvelles recrues sont finalement enrôlées dans le Corps expéditionnaire du Canada. Plus de 24 000 conscrits sont arrivés en France au cours de l'été et de l'automne 1918. Ils étaient des renforts essentiels au Corps
canadien et ont apporté une contribution cruciale à ses nombreux succès au cours de la campagne des Cent-Jours qui a abouti à une fin victorieuse de la guerre.
APPUI CANADIEN À LA PARTICIPATION À LA GUERRE
Malgré la controverse causée par la conscription, la disposition du pays à la guerre se maintient à un niveau généralement élevé tout au long de la guerre. Le Canada estime que la guerre est justifiée, puisque l’Allemagne a commis une agression et s’est
comportée de façon immorale en attaquant la Belgique et la France. Les Canadiens contribuent à l’effort de guerre en se mobilisant auprès des nombreux organismes humanitaires qui surgissent pour, notamment, soulager la détresse des réfugiés belges ou
réconforter les hommes au front. Le gouvernement canadien a vendu plus de 2 milliards de dollars d’obligations de la Victoire, un placement rapportant un modeste rendement à qui l’achète. En 1917, le gouvernement a également instauré un impôt sur le
revenu. Sans doute, la création et le financement du Fonds patriotique canadien témoignent avec éclat de la générosité du pays à l’égard des soldats estropiés au front et de leurs familles éprouvées par leur enrôlement ou leur décès. Des dizaines de
milliers de familles sont accablées par le deuil de plus de 60 000 Canadiens morts au front. C’est sans compter que près de trois fois plus d’hommes, meurtris physiquement et psychologiquement, reviendront de la guerre. Pour ces gens et leur famille,
la guerre n’a pas pris fin avec l’Armistice en novembre 1918.