Transcription (traduction) de la lettre entière.
Camp du port maritime
Le 1er avril 1918
Ma chère sœur,
C’est ma soirée pour écrire à la maison et me tenir occupé. J’ai reçu tes deux lettres hier, plus une de papa aujourd’hui, mais j’imagine que tous les autres m’ont oublié. Mon [illisible] a été un gros colis. Il fait très beau ici, mais pas autant qu’il
y a une semaine.
Comme le temps file, c’est déjà le 1er avril. Ils doivent être occupés en ce moment au [illisible] avec le halage. Ce [illisible] doit être [illisible], je peux juste l’entendre parler, il ne faudrait [incompréhensible] qu’une pelle à pleine
charge de toute façon. J’espère que le halage sera efficace ce printemps parce que, autrement, le travail semble toujours repoussé. Vous devez avoir un beau printemps précoce après cet hiver si froid et si rude.
Pour autant que nous le sachions, ce sera notre dernière nuit ici avant de partir pour la France. On nous a avertis de nous préparer pour la traversée jeudi, et ils ont sélectionné ce soir-là soixante-quinze hommes des anciennes compagnies A+B du 104e.
Ils ont tout de suite été équipés, donc nous sommes prêts. Ray fait partie de la sélection. J’aurais bien voulu m’en sortir avec lui, mais il se peut que nous puissions être réunis là-bas. Nous allons tous au 26e. Il faut s’attendre à voir bientôt de
la ferraille, car ils ont envoyé tous les hommes de la compagnie A dans la réserve. Ils prétendent que tout cela arrive en raison d’un ordre donné en France, et que les hommes sélectionnés de la 5e division seraient les mieux entraînés pour
aller là-bas. Tout ce que nous avons eu aujourd’hui, c’est une demi-heure d’entraînement physique le matin et une inspection cet après-midi en attirail de route complet. Nous devons être inspectés à la brigade demain matin, et je suppose que nous sommes
prêts. J’aimerais que l’on me pèse avec tout mon équipement sur moi, pour constater à quel point il est lourd. Voici une liste de tout le matériel que nous prenons. Nous avons sur nous : un sous-vêtement d’uniforme; une camisole; un chandail, une tunique;
des bottes Kitchener; une paire de chaussettes; un pantalon; un couteau de poche, un livret de solde; des disques d’identification; un pansement pour premiers soins; du matériel de travail consistant en une musette, un havresac, une pelle-pioche et une
ceinture de baïonnette, deux sacoches à balles contenant 150 cartouches, une bouteille d’eau et quelques autres petites courroies. Le havresac renferme un rasoir, une brosse à cheveux et une brosse à dents, du dentifrice, du savon, un sac de rations,
une serviette, un couteau, une fourchette et une cuillère. Dans la musette, il y a une couverture, des sous-vêtements de rechange, des chaussettes (j’en ai quatre paires), une serviette, des cagoules, des gobelets, une gamelle et des couverts, des mouchoirs.
Une bandoulière enroulée autour du sac, un casque en acier et une chemise en caoutchouc à l’extérieur, et toute autre chose jugée importante. Ils nous ont donné toutes sortes de vêtements ici, et nous sommes donc bien équipés pour le départ. Il nous
faudra peut-être un certain temps avant de monter vers la ligne, car ils ont beaucoup d’hommes là-bas.
Bills Will doit être en quête de quelque chose, n'importe quoi pour pouvoir se marier. C'est plus fort que lui. Cela semble être la seule grande ambition de cette vie-ci : se marier.
Cela a dû être un beau cadeau, ce que vous avez offert à Ruth. Jim ne doit pas gagner beaucoup au halage. Comment Nettie se débrouille-t-elle ces temps-ci? Elle doit avoir perdu tout espoir d'avoir Jack Ray. Jim m’a montré une photo de Gracie MacNaughton
ce soir, et je ne l’ai pas reconnue au début. J'imagine qu’elle est maintenant une jeune femme. Alors J.W. va construire une drague! [illisible] est mesquin [illisible] travaille contre lui. La pauvre Annie McKenzie n’aurait pas pu prendre beaucoup de
plaisir à cela, assez pour rendre fou n’importe qui, ici avec Alex. Katie doit bien aller à l’école, n’était-ce pas gentil de la part de Mademoiselle Murphy de faire ça [illisible]. J’ai envoyé un peu d’argent à Kate, elle a peut-être besoin de petites
choses. J’aimerais en avoir assez pour t’en envoyer. J’ai envoyé des livres [illisible] à Kate. Nous avions économisé pour un laissez-passer. La semaine dernière, j’avais plus de vingt livres, à moi et ce que je gardais pour d’autres camarades. Ils économisaient
tous pour un laissez-passer, mais la sélection a tout annulé.
Eh bien, je suppose qu’il n’y a pas grand-chose à écrire au sujet d’ici. Ne vous inquiétez pas pour moi, car j’ai le sentiment de pouvoir revenir, d’être prêt quoi qu’il arrive. Vingt et un mois vendredi prochain, depuis que nous avons débarqué ici...
Je parie que nous sommes ici depuis plus longtemps que les autres bataillons qui ont traversé et ne sont pas allés en France en tant qu’unités. Il se peut que je ne puisse pas écrire régulièrement depuis la France, alors ne vous inquiétez pas si mes
lettres ne viennent pas aussi souvent. Je vous écrirai dès que nous arriverons en France, mais je suppose que le courrier à l’ancienne adresse nous suivra jusqu’à ce que nous soyons installés. Nous irons d’abord à la base d’Étaples (c’est comme ça que
ça se prononce, je ne sais pas comment ça s’écrit), j'ignore combien de temps nous y resterons.
Très affectueusement,
Archie
P.-S. : Le Maj Pringles [illisible] a pris la parole à l’église congrégationaliste à Seaford hier soir. Si je l’avais su, je serais descendu pour l’entendre.