Transcription et traduction de la narration entière de John Covan.
[DÉBUT : 00:00]
John Covan : J’allais à l’école secondaire à Windsor, en Ontario. Quand la guerre a commencé, ils nous ont donné un entraînement militaire, ce qui veut dire qu’on nous faisait défiler tout autour du terrain de football avec des fusils en bois sur
l’épaule. En tout cas, je me suis engagé dans le corps des transmissions, où je n’avais pas besoin de marcher au pas avec un fusil en bois sur l’épaule. En tout état de cause, quand j’ai eu le niveau théorique requis, je suis allé me porter volontaire
dans les forces aériennes. Et ils m’ont demandé de revenir quelques mois plus tard. J'ai su par la suite pourquoi : tous leurs centres de formation étaient pleins, et ils ne pouvaient donc plus accepter de nouvelles recrues pour le moment.
[TEMPS : 00:41]
J.C. : Entre-temps, j’avais entendu parler de la marine marchande, alors je m’étais renseigné et j’avais décidé de m’y engager. Je me suis engagé en 1942, mais j’ai dû attendre jusqu’à ce qu’ils m’envoient sur la côte est pour l’entraînement. Et
là encore, on nous a envoyés dans le premier endroit qui avait de la place pour l’entraînement. On a eu douze mois de formation à la navigation, au maniement des bateaux, comment se servir d’une arme. Les officiers de la marine étaient venus pour nous
donner des instructions en ce qui concerne l’armement et après 12 mois, ou 12 semaines, je devrais dire, on m’avait envoyé rejoindre mon premier bateau à Vancouver, un navire canadien tout neuf, fraîchement sorti de l’arsenal, le Green Gables Park Je
suis resté sur ce bateau pendant les trois années qui ont suivi.
[TEMPS : 01:35]
J.C. : Et bien, on naviguait dans le Pacifique Sud et on voyageait jusqu’au Royaume-Uni aussi, en passant par le canal de Panama. On avait livré notre cargaison dans différents ports australiens. Sur le chemin du retour, on nous avait envoyés aux
îles Fidji et on avait chargé une cargaison de sucre à remporter à Vancouver. Notre officier en second du moment, qui avait déjà subi un torpillage, avait étudié la carte et pensait qu’il y avait des sous-marins japonais dans le coin, et que l’endroit
où on se trouvait était sûrement trop risqué. Alors il a détourné sa route d’une quinzaine de km de ce qui était prévu, trois navires juste derrière nous, des bateaux américains, se sont fait torpiller. Deux d’entre eux ont été capables de rejoindre
le port, mais un n’a pas pu. En direction du nord du canal de Panama, on a été pris dans une tempête et on s’est retrouvé avec à peu près trente centimètres de glace partout. C’était en décembre ou en janvier. Notre navire est finalement arrivé à Halifax
où on s’est joint à un certain nombre d’autres bateaux, et tous se sont rendus au Royaume-Uni.
[TEMPS : 02:46]
J.C. : À deux jours au large d’Halifax à peu près, on a rejoint un autre convoi qui remontait de la côte. Ça formait un très grand convoi, et on a continué la traversée. Dans les convois de l’Atlantique Nord, les vaisseaux éteignaient toutes les
lumières après la tombée de la nuit. On s'inquiétait tout le temps du risque d’entrer en collision avec la poupe d’un autre bateau, particulièrement à cause des embruns et de la brume. Aucun des bateaux n’était équipé de radars à cette époque. On avait
l’habitude de traîner une petite bouée derrière le [...] c’était comme un ski nautique avec une espèce de bec qui crachait de l’eau en l’air, entre 60 cm et 1 mètre de haut. Et on essayait de le laisser bien en vue. Le bateau devant traînait une bouée
aussi, et on en traînait une pour donner notre position au bateau qui nous suivait. C’était le seul moyen qu’on avait pour garder une idée de l’endroit où on se trouvait, et ce, jusqu’au lever du jour.
[TEMPS : 03:38]
J.C. : Les sous-marins venaient soit de l’arrière du convoi ou alors ils attendaient qu’une grande partie du convoi soit passée et restaient silencieux pour ensuite abattre les navires. Je me souviens d'une fois en particulier, où les bateaux étaient
en train de se regrouper à l'approche des côtes irlandaises. Je crois que le bateau qui nous remplaçait dans cette colonne a été torpillé.
[FIN : 04:03]