Du 10 juillet 1943 au mois de février 1945

L'invasion de la Sicile et la campagne d'Italie

En mai 1943, les Alliés l’emportent sur les Allemands et les Italiens en Afrique du Nord. C’est en s’emparant de leur prochaine cible, l’île de Sicile en Italie, que les Alliés parviendront à sécuriser la Méditerrannée pour leurs navires, et peut-être même à écarter l’Italie de la guerre.

À ce moment, les forces canadiennes en Grande-Bretagne comptent environ 250 000 militaires, constituant la Première Armée canadienne. Celle-ci est divisée en deux corps canadiens, qui combinent trois divisions d’infanterie, deux divisions blindées et deux brigades blindées indépendantes. Ces forces n’ont pas combattu depuis le raid désastreux sur Dieppe en août 1942. La population et l’armée canadienne réclament alors à grands cris une action. À la demande du Canada, les stratèges alliés intègrent à la force d’attaque initiale la 1^re division d’infanterie canadienne et la 1^re brigade blindée canadienne, ce qui donne un total de 26 000 soldats, y compris les unités de soutien d’armes et d’équipements auxiliaires. La campagne en Sicile sera la première opération terrestre prolongée du Canada après environ quatre années de guerre.

Texte contenant des poèmes écrits par des poètes amateurs canadiens en Italie — <em>Rhyme and Reason</em> (Sans rime ni raison) - Poèmes de soldats canadiens

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*The Maple Leaf*, un journal militaire, a publié ce recueil de poèmes de soldats canadiens, poètes amateurs, durant la campagne d’Italie. Des extraits choisis sont transcrits et traduits ci-dessous. De nombreux thèmes reviennent, dont la perte de camarades, la justification de la guerre et la fierté éprouvée comme Canadiens.
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OPÉRATION HUSKY : L’INVASION DE LA SICILE

Le 10 juillet 1943, les Américains, les Britanniques et les Canadiens lancent l’opération HUSKY et débarquent dans le sud de la Sicile. Les Canadiens, qui servent au sein de la 8^e armée britannique, arrivent à Pachino après avoir rencontré très peu de résistance des Italiens, démoralisés et mal équipés. À l’intérieur des terres, ils croisent des soldats allemands aguerris qui utilisent habilement le relief montagneux et les profonds ravins de la Sicile pour les ralentir. Vu les routes de la région, renommées pour leur piètre état, et les autres terrains impraticables pour les véhicules, l’approvisionnement se fait par des mules.

L’infanterie et les chars d’assaut canadiens parcourent rapidement plus de 150 kilomètres dans la chaleur accablante et engagent le combat avec les Allemands dans une série d’affrontements ravageurs au sommet des collines afin de maîtriser le cœur de la Sicile. Lorsqu’ils s’emparent de Valguernera, le 17 juillet, les Canadiens se sortent alors d’une bataille amère et épuisante dans laquelle ils auront perdu près de 150 hommes. Le 5 août, aux abords d’Assoro, ils saisissent Leonforte, Agira et Regalbuto d’une façon tout aussi sinistre. Quant au mont Assoro, il tombe sous le Hastings and Prince Edward Regiment après que celui-ci eut courageusement escaladé, en pleine nuit, les falaises escarpées qui protégeaient les défenses allemandes. Pour la bataille de la Sicile, l’Aviation royale du Canada fournit au total quatre escadrons. Trois escadrons de bombardiers de nuit Wellington bombardent l’Axe sur les terrains d’aviation, les gares de triage, les ports et les villages, tandis que les Spitfires du 417^e escadron patrouillent dans l’espace aérien au-dessus de l’armée en mouvement. Les autres membres de l’Aviation royale du Canada servent quant à eux dans la Royal Air Force tout au long de l’opération HUSKY.

Le 6 août, les unités d’infanterie canadienne sont retirées des opérations actives après 27 jours consécutifs dans la campagne. Le 17 août, toute la Sicile appartient aux Alliés, mais cette occupation aura coûté cher : les victimes canadiennes totalisent à elles seules 2 310 hommes, dont 562 morts. L’Aviation royale du Canada a de son côté perdu 154 soldats supplémentaires lors de ses opérations en appui à la campagne.

Une carte de l’île de la Sicile montre où sont débarquées les forces alliées avant de poursuivre leur avancée vers l’Italie continentale. — Sicile, du 10 juillet au 17 août 1943

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Cette carte de la Sicile tirée du manuel *Histoire officielle de la participation de l’Armée canadienne à la Seconde Guerre mondiale*, de CP Stacey, montre les lieux où les Canadiens ont progressé partout en Sicile.

Les lignes vertes (Forces américaines, 7^e armée), les lignes pointillées rouges (Forces britanniques, 8^e armée, 30^e et 13^e corps) ainsi que les lignes entières rouges (Forces canadiennes, 1^ère, 2 ^eet 3^ebrigades canadiennes) illustrent la progression en Sicile du 10 juillet au 17 août 1943. Les premiers débarquements sont indiqués par des flèches sur la côte.

En commençant à gauche de la carte, la 7^e armée des États-Unis (lignes vertes) a débarqué dans trois ports du sud, dont Licata et Gela. Ils ont ensuite traversé l’ouest et le nord-est de la Sicile.

Les Forces canadiennes (lignes rouges) débarquent à la droite des Américains, à la pointe sud de la Sicile. Suivant l’arc de progression américain, les Canadiens occupèrent une partie de l’est de la Sicile.

Les forces britanniques (lignes pointillées rouges) ont avancé dans le reste de la Sicile est. Les soldats ont débarqué dans sept ports différents le long de la côte est.

Les principales villes et les cours d’eau les plus importants sont indiqués sur la carte afin de situer l'action, outre des données topographiques de base.
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COMBAT EN ITALIE CONTINENTALE

Le dictateur italien Benito Mussolini est renversé en juillet 1943, et l’Italie est sur le point de se rendre. Les Allemands occupent alors le pays et préparent une série de lignes défensives, tirant profit des terrains élevés et des nombreux cours d’eau, pour freiner la progression des Alliés vers le centre du pays. Le 3 septembre, la 8^e armée britannique, qui comprend des Canadiens, se rend à l’extrémité sud de l’Italie à partir de la Sicile pendant que la 5^e armée américaine, au nord, envahit Salerne. Plus loin, la 1^re division canadienne et la 1^re brigade blindée canadienne atterrissent près de Reggio de Calabre, mais sont freinées par un terrain difficile et les tactiques dilatoires des Allemands. En octobre, les Canadiens avaient déjà parcouru le tiers de l’Italie, atteignant Campobasso, au sud de la ligne Gustave qui traverse de part et d’autre la péninsule allemande. Cette ligne constitue un réseau de défense dense et fixe conçu pour ralentir la progression des Alliés.

Au début décembre, les Canadiens attaquent les défenses allemandes à la rivière Moro, au sud d’Ortona. La 1^re division traverse alors la rivière et s’empare de San Leonardo après une lutte désespérée. Les soldats progressent lentement et les pertes sont nombreuses pendant que les Canadiens passent Ortona, protégés au sud par une profonde ravine. Après avoir tenté en vain de traverser cette ravine, les troupes canadiennes du Royal 22^e Régiment, aidées par l’Ontario Regiment, saisissent Casa Berardi et la conservent malgré les contre-attaques féroces des Allemands. C’est là que le capitaine Paul Triquet du Royal 22^e Régiment reçoit la Croix de Victoria, pour avoir fait preuve d’un leadership inspirant.

Le 21 décembre, les Canadiens lancent l’attaque contre Ortona. Ils ne s’empareront toutefois de la ville que le 28 décembre, principalement grâce aux Seaforth Highlanders et au Loyal Edmonton Regiment, après plusieurs jours éprouvants et exténuants à combattre pour conquérir chaque foyer, chaque rue et chaque pâté de maisons. La 1^re division est anéantie et sérieusement affaiblie, comptant plus de 2 300 victimes depuis son arrivée à la rivière Moro, sans compter 1 600 hommes épuisés par le combat ou malades.

Enregistrement audio de l’ancien combattant Bill Teleske — Bill Teleske

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Bill Teleske a pris part à la libération d’Ortona. Il a raconté des bribes de son expérience dans le cadre du Projet Mémoire. Un extrait sonore (vers 2008-2014) est transcrit et traduit ci-dessous.
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Un enregistrement audio d’Ernest Alec Bagstad — Ernest Alec Bagstad

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Ernest Alec Bagstad décrit son expérience vécue durant la bataille livrée pour Ortona ainsi que celle subie en tant que prisonnier de guerre dans cet entretien accordé dans le cadre du Projet Mémoire. L'extrait sonore (vers 2008-2014) est transcrit et traduit ci-dessous.
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Photographie en noir et blanc – Une route de terre serpente à travers les collines parsemées d’arbres. En bordure de cette route, des Canadiens inspectent un véhicule renversé. D’autres véhicules militaires longent la route. — De la ligne Gustave à la ligne Hitler

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Photographie en noir et blanc – Un soldat pose devant un panneau sur lequel on peut lire « Canada Town » (« Canadaville). Celui-ci donne la direction vers divers lieux de divertissement dans la région. — <em>Canada Town</em> (« Canadaville »)

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Photographie en noir et blanc – Des tables rectangulaires sont disposées de façon à former un grand carré (vue en plongée). Des hommes en uniforme sont assis de chaque côté des tables. — Dîner de Noël

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Photographie en noir et blanc – Un soldat canadien est accroupi sous un arbre, derrière un renflement sur un sol rocailleux et broussailleux. Ses manches sont retroussées. Il est prêt à tirer. Ses yeux plissés expriment une concentration élevée. — Tireur d’élite canadien

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Photographie en noir et blanc – Quatre croix de bois sur lesquelles sont inscrits des noms sont appuyées contre un mur de pierre près d’une clôture métallique. Deux hommes sont penchés sur une petite table en bois en train de préparer d’autres croix. — Préparation de croix de bois

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Photographie en noir et blanc – Un char d’assaut est partiellement couvert de branchages pour le camoufler. Un soldat jette un coup d’œil sur le dessus, alors qu’un autre reste devant. Un bidon d’essence est visible au sol. — Char d’assaut camouflé

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Photographie en noir et blanc – Une voie ferrée démolie s’étire derrière un gros bâtiment, vers les montagnes. Un Canadien est agenouillé près des rails pour examiner les traverses en bois endommagées, que fixe la caméra. Toutes ont été coupées de moitié. — Voie ferrée en ruines

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Photographie en noir et blanc – Des soldats canadiens en position accroupie ou couchée pointent leur fusil. Un homme gît inerte sur le sol près d'eux. — Tirs de mitrailleuse

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Au début de 1944, la 5^e division blindée canadienne s’unit à la 1^re division d’infanterie canadienne et à la 1^re brigade blindée canadienne (renommée ainsi depuis peu) en Italie, formant par ce fait même le 1^er corps canadien. Ce printemps-là, dans le but de s’emparer de Rome, la 8^e armée britannique est mandatée pour attaquer la ligne Gustave et la formidable ligne Hitler, située tout juste au nord, dans la vallée de la Liri. C’est le 23 mai que les Canadiens attaquent la ligne Hitler en compagnie des autres forces alliées. Cet endroit terrifiant présente des bunkers de béton, des tourelles de chars d'assauts servant d’artillerie fixe, une grande concentration de mitrailleuses et de mortiers, des fortifications bâties en terre et de denses bandes de mines terrestres et de barbelés. Malgré cela, le 1^er corps canadien parvient à forcer la ligne Hitler et à traverser la rivière Melfa. Le major J.K. Mahoney du Royal Westminster Regiment recevra la Croix de Victoria pour son rôle dans cet affrontement provoqué par une puissante contre-attaque allemande.

Le 4 juin, les Alliés entrent à Rome. Les Canadiens ont alors droit à une période de repos au sein de la réserve en vue d’intégrer les milliers de renforts dont l’armée a grand besoin. Entre-temps, les Alliés avancent vers le nord, s’emparant au passage de Florence (avec l’aide de la 1^re division canadienne) et de Pise. Or, les Allemands ont créé une autre puissante ligne défensive – la ligne Gothique – pour protéger le nord industriel de l’Italie. C’est alors que les Canadiens, bien reposés, dirigent l’attaque des Alliés, déclenchée le 25 août. L’objectif du Canada est de franchir la ligne Gothique le long de la côte Adriatique, à Pesaro, et de dépasser Rimini. La progression est lente et les pertes, lourdes, car les Allemands défendent avidement les six lignes fluviales qui entravent la route des Canadiens. À la rivière Savio, le soldat Ernest « Smokey » Smith des Seaforth Highlanders reçoit la Croix de Victoria pour son exploit courageux : il a attaqué seul, dans un combat rapproché, un groupe de l’infanterie allemande accompagné de chars. Bien que la ligne Gothique soit enfin franchie, ce n’est que le 22 septembre que le mur de défense des Allemands est percé. Pendant ce processus, chez les Canadiens, le bilan s’élève à plus de 2 500 victimes.

La progression des troupes est aussi freinée par l’automne pluvieux. Néanmoins, au début décembre, les Canadiens s’emparent de Ravenne, juste avant que les intempéries les forcent à interrompre leur offensive. La campagne d’Italie prend alors fin pour les Canadiens. En février 1945, le 1^er corps canadien est transféré dans le nord-ouest de l’Europe pour y retrouver la Première Armée canadienne. Plus de 92 000 militaires canadiens ont servi en Italie. Il y eut près de 26 000 victimes, dont plus de 5 400 morts.